Creppe : les fêtes de l’Epiphanie (1964-1970)

Les fêtes de l’Epiphanie à Creppe étaient organisées par les membres du Comité des Fêtes et du Conseil d’Administration de l’Amicale du Plateau. Elles se déroulèrent de 1964 à 1970.

1965 : le dimanche 10 janvier : les Rois Mages arrivent à Creppe, Léon Starck, Jean-Pierre Legrand (Gaspard), François Fraiture (Balthazar), Marcel Boniver (Melchior), Gustave Pattyn.  (Photo collection R. Starck)

1965 : le dimanche 10 janvier : les Rois Mages arrivent à Creppe, Léon Starck, Jean-Pierre Legrand (Gaspard), François Fraiture (Balthazar), Marcel Boniver (Melchior), Gustave Pattyn. (Photo collection R. Starck)

C’est, semble-t-il, suite à la bonne initiative de Georges Barzin, le directeur de l’Office du Tourisme de la Ville de Spa, que les Creppelains, via le Comité des Fêtes de l’Amicale du Plateau, décidèrent de mettre sur pied un jeu de l’Epiphanie. Il faut savoir, qu’au Moyen Age, la population des petits villages ardennais se réunissait sur la place publique, afin de célébrer l’arrivée des Rois Mages à la crèche de Bethléem. A cette occasion, toute la population, enfants en tête, défilait en cortège à travers les rues de la localité.

Durant sept ans, les habitants de Creppe ont ressuscité cette tradition médiévale. La fête de l’Epiphanie était organisée le dimanche le plus proche du 6 janvier. Elle commençait toujours par le même rituel. Les Rois Mages, guidés par l’étoile, cheminaient par les ruelles du bourg et se dirigeaient vers la crèche pour offrir à l’Enfant-Dieu leurs précieux présents : l’or, l’encens et la myrrhe. Au fil de leur progression, ils étaient rejoints par les bergers et les bergères de la localité, couverts de peaux de mouton, accompagnés de leurs troupeaux, ainsi que par des tribus de « Bédouins creppelains » drapés de vêtements colorés. Ce pittoresque et pieux cortège avançait lentement dans les rues du village, à la lueur des flambeaux.

1965 : le dimanche 10 janvier : la crèche vivante située à l’entrée de l’église (photo collection R. Starck) ?    , Jacques Ansay, Martine Langen, Ginette Langen,   ?   , Linda Garcia (Marie),   ?   ,   ?   ,   ?   ,   ?

1965 : le dimanche 10 janvier : la crèche vivante située à l’entrée de l’église (photo collection R. Starck)
? , Jacques Ansay, Martine Langen, Ginette Langen,  ? , Linda Garcia (Marie), ? , ? , ? , ?

Tout ce petit monde était accompagné d’une chorale (en 1964 et 1965 : « La Chorale des Sources » dirigée par Guy de Bournonville ; en 1966 : « La Chorale Royale Sainte-Cécile de Pepinster » ; de 1967 à 1970 : « La Chorale Paroissiale de Spa » menée par Robert Duysinx accompagnée par son groupe de jeunes « Les Triolets ») qui entonnait des chants de circonstance parmi lesquels quelques vieux noëls wallons.

La suite de la manifestation varia plusieurs fois au fil des années :

En 1964 et 1965, le cortège gagnait ensuite l’église où le curé de la paroisse, l’abbé Polis célébrait une messe solennelle. En 1964, il était accompagné du doyen de Spa René Struman et en 1965 du Révérend Père Agathange. Après l’office, les participants partaient à la salle du village où une soirée était organisée. En 1964, une pièce wallonne intitulée « Li mirake di l’Vierge » (écrite en 1938 par le Stavelotain Camille Henrard), présentée par la troupe creppelaine (avec dans les rôles : Fernand Moureau, Madeleine Hurlet, Barthelemy Hurlet, Edouard Langen, Marie-Jeanne Langen, Henri Frerard, Henri Xhrouet et Alphonse Xhrouet) et en 1965, une soirée récréative (avec au programme : le magicien spadois Henri Caris et ses fils, des chants interprétés par les membres de l’Amicale du Plateau et « Les – 20 de Creppe » puis en finale un sketch intitulé « Les deux bect-tas ») divertirent une salle bourrée à craquer.

1966 : le dimanche 9 janvier : dans la salle de l’Amicale du Plateau Colette Pottier, Joselyne Pottier, Christiane Rossinfosse(Marie), Francisco Cozar(Joseph), Christine Loomans, Monique Langen  (photo collect. C. Rossinfosse)

1966 : le dimanche 9 janvier : dans la salle de l’Amicale du Plateau
Colette Pottier, Joselyne Pottier, Christiane Rossinfosse(Marie), Francisco Cozar(Joseph), Christine Loomans, Monique Langen (photo collect. C. Rossinfosse)


En 1966, après le cortège fut organisé à la salle un petit jeu scénique conçu et réalisé par le professeur Jean Jeanfils (délégué du Ministère de l’Education Nationale pour la province de Liège), à partir d’un vieux texte de l’Abbaye de Malmedy écrit au 11e siècle. Par la suite, la manifestation se poursuivit à l’église Saint Joseph où le curé de la paroisse célébra une messe solennelle. Tout le village regagna ensuite la salle locale où eut lieu une soirée de cabaret animée par Fernand Leroy et les membres de la troupe de l’Amicale du Plateau, suivi de la galette des rois et d’un bal avec l’orchestre « Les Mikils ».

1967 : le dimanche 8 janvier : les Creppelains viennent s’agenouiller devant le Messie A l’avant-plan : Christiane Rossinfosse, Simone Legrand, Mimie Legrand, Monique Langen

1967 : le dimanche 8 janvier : les Creppelains viennent s’agenouiller devant le Messie A l’avant-plan : Christiane Rossinfosse, Simone Legrand, Mimie Legrand, Monique Langen

De 1967 à 1970, après le cortège aux flambeaux, les participants rejoignaient la salle où un public nombreux se regroupait pour assister au jeu scénique « Le mystère de la Nativité et de l’Epiphanie », écrit au 15e siècle par Sœur Catherine Bourlet, religieuse à Huy. Ce « mystère » retranscrit en français moderne par Rita Lejeune, professeur à l’Université de Liège, a été remis en scène par le professeur Jean Jeanfils. La régie de ce jeu scénique était assurée par Louis Loomans (répétiteur de la troupe de théâtre du village) et l’adaptation musicale avait été réalisée par François Duysinx. Après le spectacle, l’abbé Polis célébrait chaque année une messe solennelle dans l’église de Creppe (en 1969, il était accompagné du Père Benoît).

La véritable cheffe d’orchestre de ces fêtes de l’Epiphanie, et cela durant les sept éditions, fut sans conteste Liliane Dresse de Lébioles, la présidente du Comité des Fêtes, aidée bien entendu par les autres membres du comité, à savoir : Fernand Moureau, Marcel Boniver, Gaston Pattyn, Alexis Gonay, Camille Rossinfosse, Victor Demaret et Barthélemy Hurlet.

1968 : le dimanche 7 janvier : les Rois Mages dans la salle du village (photo collection I. Mathy-Gonay) André Sluse, René Mathy, Roger Gaspard

1968 : le dimanche 7 janvier : les Rois Mages dans la salle du village (photo collection I. Mathy-Gonay) André Sluse, René Mathy, Roger Gaspard

Dimanche 7/1/68 : la chorale paroissiale de Spa participe au cortège ( coll J. Duysinx)

Dimanche 7/1/68 : la chorale paroissiale de Spa participe au cortège ( coll J. Duysinx)

Quelques anecdotes :

Lors de la première édition, une lourde grisaille se mourait en verglas … si bien que le hameau de Creppe était pratiquement inaccessible … la messe commença bien en retard ! Toujours en 1964, on avait oublié de grimer Melchior, le Roi « noir » … était blanc ! En 1965, les moutons, guère habitués à être conduits, refusaient d’avancer … il fallut les promener en voiturettes ! En 1968, la TV était venue filmer le samedi lors des répétitions, afin de proposer les images le lendemain aux téléspectateurs. Il faut se rappeler qu’à l’époque la diffusion n’était pas instantanée comme aujourd’hui. Malheureusement, samedi soir la neige était tombée et le dimanche soir le froid était sibérien, si bien que les animaux ne participèrent pas au cortège … les images montrées sur le petit écran ne correspondaient donc pas à la réalité … mais Creppe fut à l’honneur ce jour-là !

La Chorale « Les Triolets » 1966 : A Concordia, concert pour la Ligue des Femmes (photo collection J. Duysinx) J. Duysinx, J. Valière, B. Schmitz, R. Gérard, J.-M. Lelotte, M.   ?   , J.-L. Lodomez, J. Tefnin, G. Jérôme, J. Riga, R. Duysinx C. Lignoul, A. Legros, C. Valière, M. Schmitz, M.-L. Pirotte, C. Lenain

La Chorale « Les Triolets » 1966 : A Concordia, concert pour la Ligue des Femmes (photo collection J. Duysinx)
J. Duysinx, J. Valière, B. Schmitz, R. Gérard, J.-M. Lelotte, M. ? , J.-L. Lodomez, J. Tefnin, G. Jérôme, J. Riga, R. Duysinx
C. Lignoul, A. Legros, C. Valière, M. Schmitz, M.-L. Pirotte, C. Lenain


La Chorale « Les Triolets » a été créée en 1966, c’était la branche des jeunes de la Chorale Paroissiale de Spa. Elle s’est produite de nombreuses fois et notamment : à Concordia pour la Ligue des Femmes, pour le Mystère de Noël en 1968 et 1969, lors des fêtes de l’Epiphanie à Creppe de 1967 à 1970, à Spaloumont, …

Jean Lecampinaire (Janvier 2017)

Sources les fêtes de l’épiphanie : M et Mme Jacquy Dohogne-Cordonnier, Monsieur Roland Rossinfosse
Le Jour : éditions des 6 janvier 1964, 13 janvier 1965 et 10 janvier 1966
La Vie Spadoise : éditions des 12 janvier 1964, 17 janvier 1965, 16 janvier 1966, 15 janvier 1967, 14 janvier 1968, 19 janvier 1969 et 11 janvier 1970 Sources chorale «  Les Triolets » : Mme Jeanine Duysinx


L’année 1969, la fête des rois à Creppe

« Lorsque dimanche à la vesprée, nous gravissions la côte sinueuse, les premières maisons du village apparurent au sommet nimbées des feux du soleil couchant…bientôt la flèche du clocher pointa au-dessus des toits. Puis de distance en distance, des volutes de fumée blanche se distinguèrent montant droites vers le ciel. Autour des bûchers aux flammes claires, les habitants et leurs hôtes s’assemblaient. »

Le 12 janvier 1969 le village de Creppe était en effervescence car l’arrivée des Rois Mages dans ce hameau du plateau de Spa annonçait pour la sixième fois un spectacle populaire avec des Creppelins (nes) déguisés en bergers, pâtres, paysans, Palestiniens, Hérode et Rois sans oublier la sainte Famille. Cette manifestation était appelée « La Marche à l’étoile » ou « Le jeu de la nativité et de l’épiphanie ». Les organisateurs se composaient du Comité des Fêtes locales et de la Société de l’Amicale du Plateau. Accompagné par les chants de la chorale paroissiale de Spa, le cortège avait pris son départ au fond du village au lieu-dit Wérihay à 18 heures et s’était acheminé à la lueur des torches, jusqu’à la salle de spectacle où se déroulait le jeu scénique : « Le mystère de la nativité et de l’épiphanie » mise en scène par Sœur Catherine Bourlet, religieuse du couvent des Sœurs Blanches de Huy. L’histoire était touchante avec des images d’Epinal qui se succédaient à la vitesse des dromadaires. Elle débutait au moment où Marie et Joseph arrivaient à Bethléem pour s’achever lorsque les Rois, avertis par un Ange, présentaient leurs offrandes. M. JEANFILS et M. Robert DUYSINX étaient les créateurs des mises en scène avec le régisseur Louis LOOMANS. Mais ce texte avait été adapté à l’origine par Rita LEJEUNE professeur à l’Université de Liège.

Représentation des rois mages Mosaïque de la Basilique de Ravenne (Italie) début IVe siècle

Représentation des rois mages Mosaïque de la Basilique de Ravenne (Italie) début IVe siècle


En ces temps où la pratique religieuse s’essoufflait, cette manifestation folklorique rappelait aux jeunes et aux cœurs humains, les traditions séculaires des Ardennais qui participaient spontanément aux cortèges de l’épiphanie dans beaucoup de villages. Après le spectacle, la soirée se terminait par une messe solennelle dans l’église de Creppe avec les participations de la chorale paroissiale et celle des jeunes « Triolet ». En 1968, tous les édiles communaux avec Joseph HOUSSA, les religieux et le commandant de Gendarmerie assistaient au premier rang à l’arrivée des Rois Mages. La Présidente du comité des fêtes était Mlle L. DRESSE de LESBIOLES. Cette année, c’était la TV qui venait filmer le samedi, veille de la grande fête. Les cameramen avaient pu filmer les scènes avec des chevaux et des chèvres, mais dans un décor sans neige. Le lendemain, après des chutes de neige importantes, les mêmes scènes se sont déroulées sans ces animaux en raison du froid. Dimanche soir pendant le journal télévisé et pour les quelques Creppelins qui possédaient une TV, ils se sont vus, courageux et pittoresques, déambuler accompagnés par les Rois Mages.

C’est en 1964 que les villageois avaient pris l’initiative pour la première fois d’organiser cet évènement populaire. Les enfants de la chorale des Sources avec Guy de Bournonville chantaient lors de cette manifestation folklorique. Les acteurs de la pièce wallonne étaient la même année : Fernand MOUREAU, Madeleine et Barthélémy HURLET, Edmond et Marie-Jeanne LANGEN, Henri FRERARD, Henri et Alphonse XHROUET. Le comité des fêtes de Creppe se composait de : Fernand MOUREAU secrétaire, Marcel BONIVER vice-président, Gaston PATTYN, Alexis GONAY, Camille ROSSENFOSSE et Barthélémy HURLET, membres assistés de l’Amicale du Plateau. En 1966, la fête se terminait par un bal populaire et une soirée cabaret.

Concernant la galette des Rois à Spa c’est le 6 janvier 1914 jour de l’Epiphanie qu’elle fut distribuée à leur clientèle par les boulangers. La distribution de la galette était proportionnelle à l’importance de la famille. La guerre de 1914 et ses restrictions alimentaires mirent fin à cette tradition qui ne fut pas rétablie après l’Armistice.

Un petit mot sur Rita LEJEUNE citée dans le texte. Elle était née Marguerite LEJEUNE dite Rita à Herstal en 1906 et décédée à Liège en 2009 (Wikipédia). C’était une spécialiste de la littérature médiévale et wallonne. Elle était la fille de Jean LEJEUNE dit Jean LAMOUREUX, poète wallon et d’Adrienne VERCHEVAL. Elle a été l’épouse de Fernand DEHOUSSE et mère de Jean-Maurice DEHOUSSE, premier ministre-président de l’exécutif wallon, membre du Parti socialiste. Mais l’originalité de cette biographie, c’est que cette famille LEJEUNE est originaire de Fagne Maron à Desnié avec l’existence vers 1625 de Jacques le jeune Jacques de Fagne Maron, fils de Jacques de Fagne Maron. Le fils de Jacques le père appelé « le jeune » pour le distinguer de son paternel, a donné à ses descendants le nom LEJEUNE, qui serait aussi celui de l’entreprise LEJEUNE de l’avenue Reine Astrid. Pour l’ascendance de Rita LEJEUNE, elle a été attestée par le professeur Jacques STIENNON de Liège.

(Fonds Body – La Vie Spadoise extraits – Fagne Maron au temps passé d’André Andries)

Jean-Luc SERET décembre 2019.

Carton d’invitation à la fête de l’Epiphanie du dimanche 9 janvier 1966

Carton d’invitation à la fête de l’Epiphanie du dimanche 9 janvier 1966


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