Victor Enkart : un siècle de passion pour les fleurs !

Les Floralies en 1980 (situées sur l'Avenue Reine Astrid)

Les Floralies en 1980 (situées sur l’Avenue Reine Astrid)


L’histoire de Victor Enkart commence au château de Barisart. A cette époque, le propriétaire du château était le comte Horace van der Burcht, grand ami et voisin du comte du Chastel, propriétaire du château de la Havette. Comme toute propriété qui se respectait, le château de Barisart avait son jardinier à demeure : Monsieur Nicolas Enkart (il finira Régisseur du château de Barisart). Ce dernier assurait l’entretien des nombreux parterres, des serres, du verger et d’un potager aussi grand qu’un terrain de football. Pendant la bonne saison, plusieurs jardiniers venaient de l’extérieur pour prêter main forte au chef de culture . Nicolas avait trois enfants : Nicolas, Victor et Mariette. Nicolas, le fils, deviendra comme son père, jardinier au château de Barisart. L’épouse de Nicolas n’était autre que Berthe Tefnin, modiste et artiste connue pour ses talents. Elle avait son atelier rue des Ecomines (actuellement : bureau d’assurance Hagemann). Mariette épousa Maurice Jérôme marchand de liqueurs, spiritueux et tabac, place Verte.

Victor est né en 1894. Très tôt, il va développer une passion qui ne le quittera plus jamais : celle des fleurs et de l’horticulture. Il aimait raconter que déjà petit, il demandait à son père de l’attendre lorsqu’arrivaient les colis de graines pour les jardins. Il les déballait et les contemplait longuement. Plus âgé, il lisait avec grande attention les catalogues de vente de fleurs.

A l’âge de 18 ans, Victor Enkart cultive un premier terrain, mis à sa disposition par les Pottier, alors propriétaires du Moulin portant leur nom et situé au n° 170 de l’avenue du Marteau. (C’est dans les environs du moulin, que se trouvait autrefois le « Hola », ancien fourneau à fondre les minettes de fer.)

Les Pottier y tenaient un important commerce de céréales, farines et denrées coloniales. Ils possédaient aussi des chevaux de trait dont ils louaient les services lorsqu’il fallait, par exemple aider un lourd chariot à monter la rude côte de Malchamps. Monseigneur Pottier, qui devait être un cousin du meunier, se souvenait d’avoir plusieurs fois mené des convois jusqu’à la butte de Malchamps. Une fois le travail terminé, il redescendait les chevaux à Spa. L’abbé Antoine Pottier fut un grand défenseur des ouvriers, on peut le considérer comme l’un des fondateurs des mouvements ouvriers chrétiens. Une rue de Spa lui est dédiée (dans le quartier du Waux-Hall) .

Victor fut exempté du service militaire : il tira un bon numéro.

Pendant plusieurs années, Victor Enkart représenta une société d’engrais et de produits chimiques française : le Comptoir Parisien (CP). L’en-tête représentait un râteau croisé avec une bêche. Le siège social était situé au 68 de la rue de la Folie – Mericourt à Paris. M. Enkart et son épouse arpentaient la Belgique à moto, de château en château et d’établissement horticole en graineterie, pour représenter les produits  » CP « . Quand on demanda à Monsieur Enkart d’installer un point de fabrication et de vente en Belgique, il choisit tout de suite de s’installer à Spa. En 1924, Victor Enkart occupe le moulin Pottier et les terrains jouxtant celui-ci. Les Pottier étaient alors ses principaux actionnaires.

Pendant plusieurs années, il fut secondé par un ingénieur-chimiste : M. Stoquer. Ensemble, ils améliorèrent plusieurs recettes d’engrais. « Les clients belges sont plus difficiles que les Français » disait souvent Monsieur Enkart. La spécialité du  » Comptoir Franco-Belge d’Engrais et de produits chimiques  » était les engrais organiques fabriqués à partir de poudre d’os, de corne et de sang.

Dès l’année suivante, Monsieur Enkart installa un parc ouvert gratuitement aux curieux et touristes. Ce parc se développera peu à peu pour devenir les Floralies de Spa , attraction très appréciée des visiteurs de notre ville. Bien qu’il dît que cela ne lui prenait pas tellement de temps, il envoyait souvent son ouvrier (Monsieur Dewilde et plus tard Monsieur Regnier), travailler dans le parc plutôt que de préparer des engrais. C’est que lorsqu’on est passionné, on ne compte pas !

En 1934, il fit démolir une partie de l’ancien moulin pour la remplacer par une maison d’habitation . En 1960, la société parisienne revendit toute ses actions à Monsieur Enkart. Il changea alors la dénomination  » CP  » (Comptoir Parisien) en  » SAP « , qui n’est rien d’autre qu’un anagramme de SPA.

Parallèlement à son activité professionnelle, Monsieur Enkart prit les fonctions de président du Cercle Horticole de Spa. Il garda cette fonction pendant pratiquement 60 ans ! Tous les dimanches matin, d’octobre à avril, il invitait des conférenciers qu’il présentait. Ces conférences étaient suivies par des débats sous forme de questions-réponses . Afin d’intéresser les jeunes et de créer des vocations, le cercle Horticole organisait aussi des concours. Ainsi, pour citer un exemple, les participants recevaient des bulbes de bégonias . Quelques mois plus tard, après être passé chez chaque participant et avoir examiné les fleurs, un jury distribuait des prix pour les meilleurs résultats. Actuellement encore, le cercle horticole organise des conférences qui ont lieu les dimanches à 10 h, à l’Académie de Musique, Rue Xhrouet.

En octobre 1990, l’état de santé de Monsieur Enkart commença à se dégrader. Il mourut en février 1992. Il allait avoir 98 ans en juin. Jusqu’à la fin de sa vie, à chaque fois qu’il le pouvait, il s’occupait de son jardin. Ses fleurs, c’était sa vie !

Jean-Marc Monville


Commentaire

Victor Enkart : un siècle de passion pour les fleurs ! — Un commentaire

  1. Mon grand père, Ferdinand Verbelen, directeur de l’Ecole horticole de Vilvorde, grand ami de ce monsieur Enkart venait à Spa lui rendre visite et en même temps lui a commandé pendant des décennies ses engrais pour l’Ecole ainsi que son usage personnel.
    A l’heure d’aujourd’hui, j’achète toujours ces produits.

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