Rencontre avec Marc Renier Warnauts

Vous êtes nombreux à apprécier les illustrations de Marc Renier (son prénom) Warnauts et à nous demander de faire plus amplement connaissance avec lui. Chose promise, chose due, nous vous invitons dans cet article à le rencontrer .

Réalités. Quel est ton métier? Comment doit-on appeler ton métier ?
Je suis dessinateur de B.D., actuellement, on utilise le mot  » Bédéiste « . Après mes études à l’institut St Luc à Liège en 1982, j’ai présenté mes dessins au journal Tintin. Les éditeurs ont été intéressés et ont publié immédiatement  » Contes et Légendes du Moyen Age « . Ma carrière professionnelle commençait.  » Etre publié dans Tintin « , c’était un rêve de jeunesse qui se réalisait …
R. Tu es venu t’installer à Spa depuis quelques mois…
En fait, il s’agit d’une plus longue histoire. Ma famille est originaire de Spa, puisque ma grand-mère était une Wolff , de cette grande famille spadoise qui remonte à Collin Leloup (1326). Je suis d’ailleurs très fier
d’appartenir à cette lignée parmi laquelle on trouve Remacle Leloup, dessinateur bien connu de l’important ouvrage  » Les Délices du Pays de Liège « . Réalisant les illustrations d’un ouvrage destiné à la société des grottes de Han sur Lesse, j’ai été frappé en trouvant parmi la documentation fournie les dessins de cet endroit, réalisée par mon ancêtre, quelque 200 ans plus tôt.
Je suis venu m’installer récemment à Spa (j’ai habité une dizaine d’années à Rochefort) pour y retrouver mes racines. En effet, mon père étant militaire de carrière en Allemagne, je passais, enfant, mes vacances à Spa, chez mes grands-parents (rue Antoine Pottier) ou dans une fermette louée au Watroz et ensuite à Nivezé. Ma mère, Ghislaine Kimplaire était spadoise. Elle-même était artiste peintre (toiles et bois de Spa). Des images de Spa et de sa nature m’accompagnent depuis ma plus tendre enfance.

R. Depuis quand dessines-tu ?
Je dessine depuis  » toujours « . A l’âge de 8 ans, au retour de mes promenades avec mon grand-père dans la campagne spadoise, je dessinais avec des crayons de couleurs (rangés dans une grande boîte à cigares) ce que j’avais observé lors de la balade. Ainsi, je me souviens de dessins de nids d’oiseaux, de meules de foin, de charrettes à foin, de chevaux… La chapelle de la Roche est l’un des endroits qui a imprégné mon enfance. Mon grand-père, à l’époque, était aller voir M. Xhrouet, un peintre habitant bd Chapman avec mes dessins. Celui-ci lui avait dit « Cela lui conviendrait de faire des histoires en images »; on parlait peu de BD à ce moment. En fait, j’ai toujours dessiné et je n’ai jamais arrêté …

R. Où te situes-tu dans le monde de la BD ?
J’ai tout fait dès le départ pour éviter que l’on me colle une étiquette. Pourtant, le public garde de moi l’image d’un dessinateur spécialisé de l’époque médiévale à cause de mes premiers albums consacrés aux légendes du moyen- âge mais ma production est plus variée. J’ai réalisé, à ce jour, plus de 18 albums de genres totalement différents.

R. Pourrais-tu nous dire un mot de ce travail de dessinateur de BD ?
C’est un travail passionnant car le dessinateur doit être capable de tout dessiner. Pour ce faire, une énorme documentation est indispensable. Avant d’aborder un sujet, il me faut beaucoup lire, compulser un tas de documents iconographiques et autres, visionner de nombreux films (historiques ou documentaires). C’est très enrichissant. De plus, cela nourrit ma culture générale.
Il faut savoir également que le public d’aujourd’hui est très soucieux du respect de la vérité historique. Il est donc impératif que je me plonge totalement dans les contextes socio-économiques, politiques et historiques des époques concernées afin d’y plonger le lecteur à son tour. De plus, il me faut aussi connaître les habitudes quotidiennes des gens, par exemple la façon dont ils s’habillent, comment ils se coiffent, ce qu’ils mangent, leurs croyances, leurs façons de penser…
Au départ, je réalisais seul le scénario et les dessins. Actuellement, je collabore le plus souvent avec un scénariste (mon frère Eric, par exemple). C’est ma femme, Marie-Noëlle, qui met les dessins en couleurs. En général, il faut entre 6 à 8 mois pour réaliser une BD.

R. Utilises-tu parfois des modèles ?
Oui, très souvent. Pour dessiner les gestes avec précision, je fais appel à des amis. Je loue ou fais réaliser des costumes, des outils, des armes et je mets les personnages en situation. Ceci me permet de dessiner les attitudes d’une manière plus précise et vraie.

R. Et pour les décors ?
Les livres et cartes postales anciennes me sont d’un grand secours. Mais il m’arrive très souvent aussi d’intégrer dans mes histoires des éléments de décors de la région. Ainsi, peut-on retrouver dans des récits de la série Le Masque de Fer le musée Curtius, la cour des Mineurs et d’autres immeubles anciens de Liège, la halle aux blés de Durbuy, etc. Dans Ombres et Désirs, on peut reconnaître des sites liégeois tels le Parc d’Avroy et ses statues, le Parc de la Boverie et sa volière. Je me rends sur place pour réaliser ces dessins.

R. Quels sont tes prochains albums ?
Le deuxième tome de la série Le Masque de Fer vient de sortir aux éditions Glenat et je travaille actuellement sur le troisième tome. Je dessine également un album dont l’histoire se déroule aux USA dans les années 60, à la mort de Marilyn Monroe (sur un scénario de mon frère Eric) pour les éditions Casterman.

R. Pour en revenir à Spa, quelles sont tes impressions après ces quelques mois de retour aux sources ?
Je me suis installé avenue de Barisart et je m’y trouve très bien.
La nature et l’environnement de Spa sont vraiment exceptionnels. De plus, le quartier du Vieux-Spa est très vivant. Il s’y passe des choses intéressantes. Les habitants sont ouverts, accueillants, proches de la mentalité des vieux quartiers liégeois que j’apprécie beaucoup. En m’installant à Spa, j’aï le sentiment d’avoir retrouvé mes racines, ce qui me paraît essentiel !


La modestie de Marc Renier Warnauts risque de nous empêcher de voir l’importance de son oeuvre et sa place dans la bande dessinée. Nous vous proposons dès lors de lire ce que le Dictionnaire Mondial de la BD aux éditions Larousse dit de lui p. 442

Marc-Renier

Issu d’une famille d’artistes (ses propres frères sont également dessinateurs de bande dessinée), Marc-Renier Warnauts, qui adopte son prénom comme pseudonyme, fréquente durant trois années la section « arts plastiques » de l’institut Saint-Luc de Liège. Il complète cette formation par quelques cours du soir, dispensés à l’Acadéinie des Beaux-Arts (toujours à Liège).
Dès 1982, on le retrouve au sommaire des magazines Tintin et Super Tintin. Il y conçoit quelques histoires brèves à dominante fantastique. 1983 marque la sortie de ses deux premiers ouvrages : Le Crapaud chez Jonas et Le Reflet aux éditions du Miroir. Ce dernier ouvrage constitue son unique intrusion dans ce que l’on appelle communément le graphisme Ligne Claire.
Se spécialisant dans les contes et chroniques rurales, il réalise successivement Les Yeux du Marais en 1985, le Cri du Faucon en 1987 et la Danse de l’Ours en 1989, trois albums proposés aux éditions du Lombard. En 1986, sur un scénario de Gérard Dewamme, il entreprend la Nuit des Frelons dans A Suivre (un album chez Casterman, en 1987). En 1988, il publie Contes de l’Arbre au Loup aux éditions du Miroir. Un an plus tard, changeant de registre, il s’associe avec Frank Giroud et dessine Jackson.. Ce western paraît dans Hello Bédé, puis sous forme d’albums au Lombard. Toujours chez le même éditeur, il publie en 1990 un long récit intitulé Shosha. Cette année-là, il fait son entrée dans la revue Vécu, où, sur un scénario de Patrick Cothias et Goué-Dard, il entame la série Le Masque de Fer avec la parution du premier tome Le Temps des Comédiens.
Parallèlement, en compagnie de Rodolphe, il illustre le premier volume de Melmoth, Sur la route de Londres aux éditions Dargaud. Toujours en compagnie de ce scénariste, il prépare, d’après le roman de G. Schoënauer, la série l’Héritier des Mers du Sud, destinée aux éditions du Lombard.
Les premières planches du Cœur Mangé, une histoire écrite cette fois par Denis Lapière, paraissent, quant à elles, à Hello Bédé à partir de décembre 1991. L’année suivante, il participe à la nouvelle mise en couleurs de Corentin de Paul Cuvelier.
Prolifique, Marc-Renier ne se laisse pourtant jamais aller à la facilité. D’un trait sûr et réaliste, il mène une carrière exemplaire. Du western à l’aventure en passant par le récit fantastique ou historique, il alterne les genres avec une apparente désinvolture. Il s’impose en fait comme l’un des principaux artisans du renouveau de la bande dessinée belge.


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