L’habit des capucins

Un capucin

Un capucin

Pourquoi « l’habit des Capucins » et pas l’histoire des Capucins à Spa de 1623 à 1797 ?

Parce que « Histoire et Archéologie spadoises » a déjà publié leur histoire dans trois bulletins :

  1. Dans le bulletin de mars 1978 n°13 sous le titre « Somnambule au VXIII° siècle » M. A. Doms donne copie d’une lettre, écrite pendant la seconde moitié du XVIII° siècle, d’un fils à son oncle, relatant le décès de son père somnambule, ayant confondu la fenêtre de sa chambre avec la porte mais après qu’il eut gagné une indulgence plénière aux capucins de Spa, au jour appelé Portionculte. L’indulgence de la Portionculte est une indulgence plénière accordée par le pape Honorius III (1216-1227) à tous les fidèles qui visiteraient, le 2 août 1221, le sanctuaire de la Portionculte, première maison de l’ordre de Saint-François, près d’Assise ; elle fut rendue perpétuelle en 1223.
  2. Dans le bulletin de mars 1979, le docteur A. Henrard, en hommage à Pierre Lafagne (Léon Collin) publie « Les Capucins et la Révolution » qui décrit les bâtiments et le sort qui leur fut réservé en 1796 jusqu’à leur démolition en 1810.
  3. Dans le bulletin de juin 1993 sous le titre « Les vestiges d’art religieux de l’ancien couvent des capucins de Spa » M. L. Pironet relate l’installation des Capucins à Spa, les beaux jours de la communauté, la disparition du couvent et les restes dispersés du mobilier du Couvent des Capucins.

Notre propos est modeste si ce n’est amusant, tiré de « Spa et les Capucins 1623-1797 » de Pierre Lafagne. (Léon Collin) aux Editions « J’OSE »

C’est un des chapitres les plus curieux de l’histoire de Spa où il expose de manière complète : les origines de la communauté, la fondation du couvent, la vie des capucins de Spa, le couvent sous la révolution française. Au chapitre V ci-après il y décrit :

L’HABIT DES CAPUCINS

Leur robe était une espèce de tunique, faite de grosse étoffe brune, qu’ils portaient à même la peau puisqu’ils ne faisaient pas usage de chemise. Cette robe descendait jusqu’aux talons, elle était fermée de toutes parts et tendue sur la poitrine. Les manches étaient rondes et larges et le sacré capuce, sorte de bonnet, (capuchon taillé en pointe) terminait cet ensemble.

Ils portaient, autour de la taille, un gros cordon blanc avec une croix surmontée d’une tête de mort. Ils avaient la tête rasée et la barbe longue, point de bas, les pieds nus dans des sandales à courroie. Ils ne pouvaient se servir d’aucune voiture lors de leurs voyages. C’est pour cette raison que leur règlement intérieur leur interdisait aussi, de faire plus de quatre lieues, par jour. Il leur était défendu de porter ou de recevoir de l’argent. Les aumônes devaient être jetées dans leur capuce qui était ensuite vidé par la mère syndic. Celle-ci devait leur fournir la subsistance, faisait fonction de trésorière et était logée dans une maison à côté du couvent qui appartenait à l’ordre.

Au sujet de leur robe et des poches, qui y étaient ménagées, nous (Pierre Lafagne) citerons la fameuse description contenue, dans un petit ouvrage, paru en 1782 et dont l’auteur est resté inconnu. (Amusements de Spa, auteur inconnu Londres 1782 III p. 59 Edition dite de Cazin) Cette description, on va le voir, est plutôt pittoresque et, en certains endroits, faite sur un ton assez badin. En voici la teneur : Ce vêtement, tout bizarre, tout grotesque, qu’il vous paraît, semble cependant dirigé par une profonde sagesse. Cet habit est un petit monde ; c’est au moins une espèce de château-fort et de palais. Il a ses habitants, ses gardes, ses redoutes, ses galeries, ses caves, ses lieux de plaisir, de provision, de commodité, d’étude et de galanterie ; en un mot il renferme en soi tout ce que la mécanique peut imaginer de commode ou d’utile.
Un capucin, vêtu selon les règles inviolables de son ordre, peut dire avec plus de raison que Bias même, ce sage tant vanté, (un des 7 sages de la Grèce – 570) qu’il porte tout avec soi. Sans badinerie, un équipage de six chevaux n’a pas plus de ressources pour le voyage, que l’habit d’un capucin.

Ils ont seize poches autour d’eux, toutes séparées les unes des autres, sans cependant qu’on les aperçoive, et chaque poche a son nom.

  1. La première s’appelle la « galerie. » C’est une grande pièce d’étoffe cousue en dedans et tout autour du manteau, avec une ouverture de chaque côté. Ils y mettent le bréviaire, le petit livre de prières, les sermons pour l’Avent, le Carême et pour tous les dimanches de l’année, avec quatre panégyriques de saints, dont les noms sont en blanc, le tout au nombre de 22 discours.
  2. La seconde, nommée « tapecul » est un petit sac de grosse toile, attaché au manteau, en dessous de l’épaule droite. Elle est destinée à mettre une couple de bouteilles qu’ils ont soin de remplir dans toutes les bonnes maisons où ils passent, pour prévenir, les besoins des mauvais gîtes.
  3. La troisième se place sous l’épaule gauche. Elle est plus large par le bas que par le haut et descend jusqu’au bas de celle qu’ils appellent « galerie » ; ils la nomment « l’abîme« . Elle sert à ranger commodément, les grosses provisions comme jambons, éclanches, (épaule de mouton) dindons, pour les routes un peu longues.
  4. La quatrième qu’ils nomment la « cuisinière », est un petit sachet de cuir,placé sous le « tapecul. ». Ils y mettent les épiceries pour faire les petits ragoûts mignons dans les auberges où ils trouvent des compagnons qui les défraient. (les déchargent des frais)
  5. La cinquième, appelée la « friponne », est placée sur un des bords du manteau, en dedans. C’est la retraite des biscuits, massepains et autres petites friandises qu’ils y fourrent modestement quand ils se trouvent à quelque table abondamment servie.
  6. En même distance, mais du côté gauche, est placée une poche de même largeur, qui contient la toilette du voyage. Elle renferme, l’étui à barbe ou la bourse dans laquelle ils la serrent pendant la nuit, le petit peigne, les ciseaux, le rasoir pour la lèvre supérieure, la savonnette pour les bras et les jambes, le musc et autres parfums convenables pour entretenir la bonne odeur de l’ordre ! Cette poche, qui n’est d’usage que parmi les capucins coquets, s’appelle la « précieuse »
  7. Un peu au-dessus, ils en portent une autre, qu’ils nomment la « nécessaire ». Ils y mettent, en effet, de l’onguent contre les polypodes (plantes cryptogames- fougères), un peu de mercure, quelques bouts de chandelle contre les écorchures, des pommades et autres drogues secrètes.
  8. Vis-à-vis de l’autre côté, pour la symétrie et le contrepoids, ils portent un petit sachet qu’ils nomment la « ménagère ». Il ne sert que dans les voyages de long cours : c’est pour y mettre quelques morceaux de cuir, une alène, du fil, des aiguilles et quelques lambeaux d’étoffe pour rapetasser la robe ou les sandales.
  9. Vers le bas du manteau, au côté droit, précisément au bout de la « galerie », ils ont encore une poche appelée « l’arménienne » où ils mettent le café, le petit moulin, la petite boîte de thé, le sucre etc, pour régaler les sœurs du tiers-ordre. Celle-ci n’est permise qu’aux pères confesseurs.
  10. A l’autre bout de la « galerie », il y a une poche toute semblable, nommée « l’indienne ». Elle sert à porter l’étui à pipe, la râpe, le tabac.
  11. Voici la liste des poches sous le manteau ; celles qui suivent sont sur la robe même.

  12. La « calante » (N.d.l.r : qui sert à caler) est le nom d’une petite poche pratiquée sous la manche droite de la robe, au dessous de l’aisselle. A cause de sa situation, elle est faite de toile cirée, ils y mettent la tabatière au tabac d’Espagne, la liste des morts et mariages des personnes qualifiées, pour pouvoir entretenir décemment les gens de condition qu’ils visitent.
  13. Ils appellent la « proprette » un autre petit réduit, placé sous le pli du coude, où ils gardent le mouchoir blanc destiné à s’essuyer le visage dans les belles compagnies seulement.
  14. Le repli de la manche gauche forme naturellement une treizième poche, qu’ils appellent la « bourgeoise », où ils mettent le mouchoir à tabac et la tabatière commune.
  15. La quatorzième qu’ils nomment la « dévote » et qui est beaucoup plus propre que les autres, est pratiquée sous les plis de la robe et sur la poitrine. C’est là qu’ils mettent les petits reliquaires, les Agnus Dei pour les dames, les chapelets, les grains bénits, pour les valets et les servantes, les noms de Jésus et les petites croix musquées, pour les gens de la campagne ; enfin un petit portefeuille contenant les lieux d’étape sur la route, de petites oraisons imprimées et des relations de quelque capucin trouvé mort dans les neiges, pour édifier les âmes dévotes et ranimer la charité des personnes bienfaisantes envers l’ordre.
  16. La quinzième, enfin, qui n’est qu’à l’usage des gros bonnets, s’appelle la « discrète ». Elle sert à rapporter au couvent l’argent des messes, les restitutions, les dépôts et les testaments. Cette poche est placée au fond du sacré capuce, que pour lors ils portent rabattu sur le dos en forme de hotte. Elle est interdite, sous peine d’excommu-nication, à ceux qui n’ont pas qualité pour la porter.
  17. Outre ce nombre de poches, il y en a encore une improprement dite et nommée pour cela la « libertine » Elle est percée entre deux cuirs dans l’épaisseur des sandales et sert à cacher l’argent que les capucins relâchés reçoivent en secret de leurs familles. Aussi est-elle de contrebande parmi eux et ceux qui s’en servent ne le font qu’en secret. Ils prétendent pourtant ne pas violer la sévère défense de porter de l’argent; ils croient seulement l’éluder en disant que, loin de le porter, ils le foulent aux pieds.
  18. Autrefois, à Spa, lorsque Charles Henrard, né à Spa en mars 1891, en religion le père capucin Agathange, sollicitait notre générosité, nul n’a jamais soupçonné un tel équipement que porte différemment aujourd’hui, en poids seulement, le fantassin.

    In fine, un petit rappel. C’est en 1574 que l’ordre mendiant, rameau distinct de l’arbre franciscain, obtint du pape Grégoire XIII (1572-1585) la liberté de se répandre partout dans le monde afin de combattre « l’hérésie » par la Contre-Réforme. L’ordre fut aboli en France en 1790, mais il a reparu depuis 1851. Sur leur robe d’étoffe brune, les capucins portaient un manteau et une calotte sur le sommet de leur tête. Ils faisaient vœu de pauvreté. Personne n’a oublié deux célèbres capucins : Saint François d’Assise et l’abbé Pierre.

    Monique Poncelet
    Louis Guyot


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