Les tranchées du Kaiser

Il est de notoriété publique qu’en 1918, durant son « séjour » spadois, l’empereur Guillaume II se promenait souvent dans les bois nivezétois environnant les propriétés Peltzer, propriétés qui lui avaient été réservées. Mais, outre la promenade, le Kaiser pratiquait d’autres «activités récréatives», parmi celles-ci on peut citer : la chasse au furet, la création de sentiers forestiers, l’élagage des arbres, la coupe du bois, le nettoyage et le dragage des ruisseaux dont celui d’Orléans, etc. Comme l’humour ardennais ne se perd en aucun cas, il fut surnommé par nos aïeux «Guillaume le cantonnier».

1918 : Sur la terrasse du château du Neubois, résidence du Kaiser (carte postale)

1918 : Sur la terrasse du château du Neubois, résidence du Kaiser (carte postale)


Mais, ce qu’on sait moins, c’est qu’il se faisait photographier dans des pseudo-tranchées qu’il passait son temps à creuser lui-même ( ?) dans les environs du château ! Voici ce que disent sur le sujet plusieurs revues de l’époque :

«Est-il nécessaire de dire que l’empereur était très gardé ? Il faut faire le vide autour des grands, lorsqu’ils n’ont pas la conscience très tranquille. Au reste, les allées et venues du personnage étaient nombreuses ; bizarres, son attitude, ses manies. De rares passants l’apercevaient parfois, de loin, à travers les arbres, protégé par des factionnaires, se livrant à d’étranges travaux, bêchant, remuant la terre, cultivant — nouveau Candide — ce jardin qui n’était pas le sien, y dessinant lui-même des tranchées, des gabionnages». (Extrait de : L’Illustration du 7/12/1918)

Tranchée (carte postale)

Tranchée (carte postale)


«Que fait l’empereur?… Pendant trois jours, il cesse de chevaucher chaque matin, à Balmoral, autour du romantique lac de Warfaz. On le voit, vêtu d’une mauvaise capote, usée, trouée, s’acheminer vers les bois qui avoisinent son parc, et, là, s’y livrer, pelle et pioche à la main, à de durs travaux de terrassier. Le troisième jour, quand il s’est bien fait la main, si j’ose dire, arrivent en auto deux opérateurs de cinéma qui filment sans sourciller le Kaiser aux tranchées de première ligne pour une kolossale propagande». (Extrait de : Les Annales du 5/1/1919)

«On a raconté aussi sa manie de préparer des pseudo-tranchées pour s’y faire photographier en train de combattre les Français, blancs et de couleur, comme disaient les communiqués fameux de Ludendorff. Un jour, Guillaume fit porter une grande quantité de sacs remplis de sable sur les Fagnes, où une tranchée profonde avait été aménagée. La photographie que les journaux firent paraître portait comme titre: l’Empereur dans les plaines de la Champagne. On dit aussi qu’il s’y fit cinématographier».
(Extrait de : Notre Pays du 4/7/1920)

Jean Lecampinaire
Sources : Spa pendant la Guerre 1914-1918 (Jacques Macquet – Ad. Com. De Spa – Bruxelles – 1919) Guillaume II à Spa (Georges de la Roche – Editions J’Ose – Spa – 1936) Spa-Ancien (Pierre Lafagne – Editions J’Ose – Spa – 1934)


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