Les cloches de Pâques

Avec la fête de Pâques, on voit revenir chez les chocolatiers et les confiseurs les délicieuses cloches en chocolat ou en sucre. La cloche est un des symboles de cette fête chrétienne. Dans notre région, il est habituel de raconter aux enfants que les cloches partent pour Rome et reviennent à Pâques, chargées d’œufs qu’elles déposent dans les jardins.

Origine des cloches de Pâques
oeufs
Cette tradition prit naissance lorsque vers le VIIe siècle, l’Eglise interdit de sonner les cloches en signe de deuil entre le Jeudi Saint et le Dimanche de Pâques pour commémorer le temps qui s’écoula entre la mort du Christ et la résurrection. Pour le voyage, les cloches se munissent d’une paire d’ailes, de rubans ou sont transportées sur un char. Les enfants ont beau regarder dans le ciel, ils ne parviennent jamais à voir ces fameuses cloches de Pâques. Leur déception est cependant vite oubliée en découvrant les oeufs cachés dans les jardins. Il n’en fut cependant pas toujours ainsi. En effet, des superstitions restées vivaces dans les campagnes avant le VIIeme siècle, poussent les agriculteurs à voir dans le ciel des cloches « brillantes et rougeoyantes ». De nombreux paysans affirment en avoir vu filer au-dessus de leurs champs en faisant entendre un bourdonnement. En 587, Grégoire de Tours notait: « Nous vimes pendant deux nuits de suite, au milieu du ciel, une espèce de nuage fort lumineux qui avait la forme d’un capuchon » (1)

Durant cette période avant Pâques, les cloches sont remplacées par des crécelles ou des martelets.

Mais savez-vous qui a inventé la cloche ?

Origine de la cloche: de la Chine aux clochers des églises

Dès que l’homme sut créer des vases en argile, il se rendit compte qu’en les heurtant, ceux-ci produisaient un son; il avait inventé la cloche.

La cloche est certainement l’un des premiers instruments sonores créés par l’homme. On trouve ainsi des cloches de bois réalisées par quantité de peuplades primitives.

Un document chinois daté de 2260 avant Jésus-Christ rapporte que l’Empereur Hoang-ti fit fondre douze cloches. Des cloches de bronze datées de 1100 avant J.C. ont été retrouvées en Chine. Le plus vieux carillon date de 500 avant Jésus-Christ. Composé de 65 cloches, il était également d’origine chinoise.

La Chine est donc le berceau de la cloche. Cette technique se répandit aux Indes, puis via les vallées du Tigre et de l’Euphrate en Egypte. La cloche gagna alors le monde méditerranéen où sa présence est attestée vers 700 avant J.C. Les Grecs et les Romains s’en servaient notamment pour réveiller les esclaves et les appeler.
Cloche
La cloche pénétrera en Gaule et c’est principalement l’Eglise catholique et plus particulièrement les moines qui vont en faire un instrument religieux. St Patrick emmena en Irlande (vers 440) de nombreux évêques mais également des fabricants de cloches. Celles-ci étaient en fer brazé et devaient être frappées par un maillet. La cloche servait essentiellement à appeler les moines aux offices religieux. La mention du premier clocher apparaît en 735.

Charlemagne ordonne que les prêtres fassent sonner les cloches à certaines heures du jour et de la nuit (801). En 817, il fut décidé que chaque église paroissiale devait être munie d’au moins deux cloches.

Des usages variés

    La cloche ne servira pas uniquement à appeler les moines aux offices. Elle devint rapidement un instrument de communication. Le pouvoir civil s’empara donc également de la cloche et l’on construisit des beffrois car les cloches permettent d’informer rapidement la population.

  • Annoncer l’heure à tous

    Jusqu’il y a quelques siècles, la majorité de la population ne disposait pas de moyens pour mesurer le temps. La cloche constitua donc un progrès important car elle permettait à chacun, qu’il travaille en ville ou dans les champs, de connaître l’heure. Des sonneries particulières indiquaient la fin de la journée (le  » salve « ), le couvre-feu,etc.

  • Un signal pour rassembler la population.

    La cloche va pouvoir informer instantanément la population lors des sinistres, des incendies, des invasions, et de toutes sortes de périls (le tocsin). Elle avertit aussi les citoyens des assemblées du Magistrat, des passages de troupes, des fêtes.

  • Un instrument de repérage

    On avait coutume jusqu’à une époque récente, durant les soirées de tourmente, l’hiver, de sonner les cloches pour guider les voyageurs attardés ou égarés dans la neige ou le brouillard. Ainsi, par exemple, la cloche de la Baraque Michel sonnait inlassablement dans la brume et sauva de nombreux voyageurs égarés. Avant l’invention des phares, la cloche servait aussi à guider les marins à travers les rochers de la côte. Les cloches installées aux passages à niveau signalaient aussi le danger que pouvait représenter l’arrivée d’un train.

  • Participer aux événements exceptionnels

    Lors de la venue dans la commune d’une célébrité ou d’une haute personnalité, on a l’habitude de faire sonner les cloches. Le 2 octobre 1990, à minuit, toutes les cloches de Berlin ont été mises en branle à l’occasion de la réunification de l’Allemagne.

  • La sonnerie du glas

    Les premières attestations de la « cloche des morts » semblent remonter au VIIIe siècle. La sonnerie est constituée d’un nombre fixe de coups. Ce nombre varie avec la condition sociale du défunt (et les sommes payées par les familles). La sonnerie permettait, de distinguer un homme d’une femme, un enfant d’un adulte et même son origine géographique (trois fois trois coups puis la grosse cloche pour les hommes, deux fois trois coups puis la « grande » volée pour les femmes). Son but est donc d’annoncer à toute la communauté la mort d’un de ses membres.

  • Les cloches et la grêle

    Selon la tradition, les cloches éloigneraient la foudre, la grêle grâce à leurs sonneries. Chacun sait combien les gens de la terre craignent les orages dévastateurs des récoltes, la grêle qui ravage les vignes. Dans de nombreuses régions, il y a encore quelques années, les agriculteurs pensaient que les cloches avaient le pouvoir d’éloigner les orages. Ainsi, la cloche porte parfois le nom de « Sauveterre ».

    L’origine de cette croyance est à associer avec le pouvoir symbolique des cloches, lien entre le ciel et la terre, voie de Dieu. Faire sonner les cloches, c’est en quelque sorte lancer vers Dieu une prière demandant d’épargner les hommes. On essaya ensuite de justifier par des raisons scientifiques (les ondes sonores déchirent les nuages) cette ancienne croyance. Cette sonnerie créa pas mal de conflits entre les villages; les uns accusant les autres d’avoir repoussé l’orage sur leurs terres. On s’est cependant aperçu de l’efficacité très relative de ce pouvoir et surtout du danger qu’encourait le pauvre sonneur. En Allemagne, en l’espace de 33 ans, on constata, vers 1750, que la foudre était tombée sur 386 clochers et que 121 sonneurs avaient été victimes de leur imprudence, tués ou commotionnés en sonnant sous le tonnerre. Le paratonnerre, faut-il le dire, n’avait pas encore été inventé.

    La cloche peut cependant servir indirectement à prédire le temps. Celui qui entend le son des cloches d’un village voisin peut savoir d’où vient le vent et dire s’il annonce la pluie. La cloche sert aussi d’indicateur en cas de tremblement de terre. Elle permet de déterminer la direction des ondulations du sol.

    Il y aurait encore bien d’autres aspects à aborder dans cet article, mais nous en resterons là aujourd’hui. Parler des cloches, c’est bien, les entendre c’est mieux.

    Pol Jehin


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